Sœur Gloria, témoin de foi et d’espérance au milieu du désert du monde

Entendre la nouvelle d’un enlèvement d’une personne dans les médias est toujours frappant. Surtout s’il s’agit d’un contexte de guerre, ou d’une population qui souffre de pauvreté, d’injustice ou de manque de respect pour la dignité de la personne. La perspective change lorsque nous habitons loin des lieux de pareils événements. Nous avons tendance à normaliser les faits : « Cela arrive un peu partout dans le monde. » En juillet dernier, il m’est arrivé de rencontrer une missionnaire qui était enlevée en Afrique. Son témoignage m’a bouleversé.

Alors que je participais au 100^e du Congrès missionnaire national des OPM en Colombie (à Bogotá), j’ai eu le privilège de connaître et d’échanger fraternellement avec Sr. Gloria Cecilia Narváez Argoti, f.m.i. (de la congrégation des Franciscaines de Marie-Immaculée). Originaire de la Colombie, la religieuse missionnaire œuvrait auprès du peuple malien depuis 2010. Elle vivait, décrira-t-elle, « dans une région majoritairement musulmane », où elle a pu mettre en pratique « le charisme de ma communauté inspiré par saint François d’Assise [qui met] particulièrement l’accent sur la fraternité comme don de Dieu » (cf. Préface du Rapport sur la liberté religieuse 2023 par Sr. Gloria Cecilia Narváez Argoti, publié par l’Aide à l’Église en détresse).

Le 7 février 2017, Sr. Gloria a été prise en otage par des djihadistes dans le sud du Mali, tout près de la frontière avec le Burkina Faso. Elle a vécu quatre ans et huit mois de captivité…

« J’ai été prise pour cible, frappée et insultée pour avoir professé ma foi catholique, ou du moins pour avoir essayé de le faire. Pourtant, malgré ces circonstances défavorables, le mauvais temps, les abus quotidiens, les humiliations, la privation de nourriture et d’eau, je n’ai jamais – pas une seule fois – manqué de remercier Dieu de m’avoir permis de me réveiller et d’être en vie au milieu de toutes ces difficultés et de tous ces dangers » (2. Ibid.).

Libérée le 9 octobre 2021, la sœur franciscaine est sortie de cette immense épreuve en témoin de l’amour et de la miséricorde de Dieu, même après avoir vécu l’un des moments les plus extrêmes de sa vie : « Même si cela semble paradoxal, ce fut peut-être l’une des plus grandes bénédictions que Dieu m’ait données » (3. Ibid.), a-t-elle déclaré.

Annoncer l’Évangile à contre-courant

Aujourd’hui, Sr. Gloria continue d’œuvrer auprès des peuples qui en ont le plus besoin. Elle me raconte qu’en ce moment elle se trouve en mission à Tumaco, au sud-ouest de la Colombie, proche de la côte pacifique. C’est une région touchée par la pauvreté, par la violence et les conflits entre plusieurs groupes qui se disputent le contrôle du pouvoir dans le territoire.

En côtoyant Sr. Gloria, j’ai constaté que ses jours en captivité ne lui avaient rien volée à l’égard de son amour et de son engagement envers les plus pauvres. La joie, l’humilité, la foi et l’espérance de cette religieuse m’ont touchées et m’interpellent encore.

L’expérience de captivité qu’elle a vécue, privée de liberté, du contact avec sa communauté et son peuple, en plus des nombreuses humiliations qu’elle a dû subir à cause de sa foi, est un exemple pour nous tous qui avançons parfois à contre-courant dans le monde d’aujourd’hui. C’est un exemple remarquable – à l’instar de tant d’autres personnes – au milieu d’une société qui, au-delà de son caractère pluraliste et séculaire, montre des signes de haine contre ceux et celles qui proclament leur foi et veulent vivre les valeurs chrétiennes en annonçant que Jésus est vivant.

« Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice »

Un calice dessiné sur le sable en mémoire des eucharisties célébrées avec foi et amour, effacé chaque jour par les tempêtes du désert ou par l’agressivité de ses ravisseurs, était le moyen que Sr. Gloria avait trouvé pour adorer le Seigneur, pour le trouver présent aussi dans les signes de la Création qu’elle a pu contempler pendant ces jours de détention sans fin.

« Heureux ceux qui sont persécutés pour la justice, car le royaume des Cieux est à eux. Heureux êtes-vous si l’on vous insulte, si l’on vous persécute et si l’on dit faussement toute sorte de mal contre vous, à cause de moi » (Mt 5,10-11) : ces paroles proclamées par Jésus lors du Sermon sur la montagne, résonnent encore aujourd’hui. Elles sont d’actualité pour tous les missionnaires de la Bonne Nouvelle qui, dans un monde déchiré par la haine, la violence, et la guerre, œuvrent encore à propager la foi et l’amour du Christ.